A toujours parler de la foisonnante scène bass music qui ne cesse de faire trembler Los Angeles, on en oublierait presque que la Cité des Anges restent encore et toujours un berceau du hip hop indépendant visionnaire, bourré de milliers d’activistes que la sous-médiatisation n’empêche jamais d’avancer. Nouveau né prometteur, Thirsty Fish est l’un d’eux, et voit sa destinée soudainement s’illuminer. Composé de trois Mcs différents mais incroyablement complémentaires, ayant tous trainé leur bosse dans l’underground californien (Dumbfoundead est un battlist de rang mondial, Psychosiz s’est aussi souvent fait remarquer, Open Mike Eagle s’autoproclame roi du Art Tap), le trio sert un cocktail à la fois avant gardiste, léger et positif, respectueux de la nébuleuse Project Blowed à laquelle il appartient.
On vous l’accorde, pour ce qui n’est pour l’heure qu’une simple sensation locale, tout cela peut paraitre très prétentieux sur le papier. Sauf que “Watergate”, premier album du groupe, invite rapidement à revoir ses préjugés tant la conjugaison des trois souffle une brise fraiche sur le genre, jusqu’à convaincre différents invités d’apporter leur poids dans la balance. A commencer par Busdriver, comme un poisson dans l’eau sur le cuivré “Grind It Out” alors qu’on aurait juré l’entendre sur l’excellente entame “Sounds Like Rap” à l’approche nettement plus alternative et electro. Ce genre de confrontation sera d’ailleurs légion tout au long de ce disque qui se frotte à la bonne humeur des Jurassic 5 ou d’Ugly Duckling (”Director’s Cut”) comme aux esprits tordus qui jonchent l’underground hip hop environnant (”Amateur Juggling”, “Initiation”): un spectre couvert et rendu possible par la diversité des producteurs crédités au sein de cet album, parmi lesquels Exile, Daedelus ou Para One.
Et pour attester du juste équilibre de ce “Watergate”, c’est en son juste milieu qu’on trouve les meilleurs titres, notamment ces “Girls…Or…Like” et “Antique Blowed Show” dotés d’un beat efficace ainsi que d’un refrain simple faisant mouche dès la première écoute. Voilà donc exactement le genre de disque capable de rameuter à sa cause deux écoles qu’on voit rarement si bien fricoter ensemble. Une belle découverte. - Mowno |